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Raimbaut d'Aurenga: Ara non siscla ni chanta (Le Joys d'Amors)

R dA

Ara non siscla ni chanta [PC 389, 12]
Raimbaut d’Aurenga (Raimbaut d’Orange), trobador (..1147-1173…)
Editeur : Pattison, p. 113
Texte de référence pour la Fin’Amors dans l’ensemble du spectacle Crozada d’Uei
Traduction Patrick Hutchinson

 Maintenant ne chante ni siffle
Le rossignol
ni ne sonne le loriot
de par les forêts et les vergers,
ni s'ouvrent fleurs jaunes ni bleues ;
naissent, au lieu,
chants et joys
en moi, qui suis éveillé ;
cela ne m'advient plus en rêve
comme autrefois.

Car « Mon Seigneur » désire
m'éloigner de douleur !
Bien fou serais
de ne pas toujours rester avec celle
qui le mieux m'a pansé du pire ;
ni fardeau
ni torture
désormais me pourront
infléchir, ni mal
d'aucune plaie endolorir.

A peine si je n'en perds
le sens ; écureuil
si vif, ni chevreuil
au pied plus leste,
car au cerveau me vient,
tant cherchée, la joie ;
en suis gai
et danse
et toute l'année le serai,
puisque ma domna
me veut et m'avance.

Rire je dois et le fais souvent ;
le cœur m'en rit
même en dormant; Midons me rit
tant doucement, j'en crois
voir le rire de Dieu
et plus me tient
joyeux son rire que si
me riaient quatre cents anges
qui voudraient me réjouir.

Ne me peuvent épouvanter
ni nuire les bandes
de faux, félons, lâches
bavards, lesquels puisse Dieu détruire ;
qu'elle me prenne et me rend captif
à jamais,
en mille ans
miens seront tous ses désirs ;
en d'autre corps ne veux
m'élancer ni concourir.

Joys ait tel que mille
douloureux
de mon joys
en auraient trop ;
de mon joys
ma parentèle vivrait en joys
sans autre nourriture ;
qui de joys veut, qu'il m'en quiert
car ai tout joys entier
de Midons qui sait si bien en donner.